Passe encore de défiler, sous prétexte d’originalité, avec la cape de paseo portée comme un drap de bain. Passe encore d’abuser les naïfs aux banderilles, passe (presque) encore de toréer de manière vulgaire, truqueuse et racoleuse. C’est son registre et il n’en connaît pas d’autre. Mais, à la sortie de l’arène, narguer le public qui lui signifie son mécontentement, c’est un affront inacceptable, un comportement indigne d’un véritable torero mais, entre tuer des toros et se comporter en torero respectable, il y a un pas que J-J PADILLA n’a pas encore franchi et dont on peut craindre qu’il ne le franchisse jamais.
Si une seule initiative devait être prise par les nouveaux décideurs, ce serait celle-là : Que se vaya, y no vuelve !
FERIA DE LA MADELEINE 2008
CORRIDA DU DIMANCHE 20 JUILLET
6 TOROS DE MIURA
pour :
EL FUNDI (Applaudissements et Salut au tiers)
J-J PADILLA (Silence et Silence)
RAFAELILLO (Salut au tiers et Deux oreilles)
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Temps chaud sans excès et nuageux. Première surprise : les gradins sont remplis, à croire que les MIURAS ne sont pas que le mythe poussiéreux qui vient à la bouche de tous les non-aficionados qui parlent de taureaux. Assis de manière incommode sur mes 45 centimètres (j’ai mesuré) de tendido ombre (72 €…) voici comment j’ai vu l’après-midi.
Bon, cela commence mal. Le fils (ou petit-fils, on ne sait plus…) de notre relique d’alguazil, déjà peu lucide la veille, manque la clé. Nul doute que ce dernier a dû passer les deux heures et demie de la corrida à se répandre dans le callejon sur la mauvaise qualité du lancer.
Allez, que vienne le premier toro de cette Madeleine. Juste avant, on applaudit à tout rompre la pancarte annonçant les caractéristiques du toro. Très bien, même si ceux qui prennent la peine de lire les documents distribués en savent tout autant. J’aurais préféré que ceux qui ont inscrit le nom de «Marmolejo» aient aussi remarqué que ce toro présentait des séquelles de coups de cornes sur la patte arrière droite. Il sort donc avec des incertitudes de trajectoires dans la cape du FUNDI. Une pique très peu appuyée n’empêche pas des protestations sommes toutes modestes au vu de la situation. Mais le matador sait y faire et distille une faena intelligente et adaptée, bien au-dessus de la qualité de l’adversaire. Un pinchazo, une entière contraire et un descabello pour conclure dignement.
Des fans donnent dans les «palmitas» avant que ne sorte le toro de J-J PADILLA. Torchonnade de cape agrémentée de sa larga à genoux. Première pique fort appuyée et poussée. Scène classique du matador faisant de grand signe au piquero de cesser le châtiment. Même si le sketch est éculé, il doit rester un quart de l’arène pour y croire. Deuxième pique prise de manière plus désordonnée. C’est parti pour les banderilles. Le «cyclone» est ébouriffant. Dans les courses plutôt que dans les poses. Peu importe, le torero confond (ou plutôt pratique) la précipitation avec la vitesse et (pour une part) le public confond vitesse et qualité.
Brindis au public qui permet à la finesse «padillesque» de s’exprimer avec un écrasement de montera du meilleur goût. Ce sera le meilleur moment de la faena dont on retiendra deux désarmés suite à la violence du toro. On attend encore la première naturelle mais ce doit être un oubli de sa part. Concluons par une demi-épée ressortant de suite, un coup d’épée vertical dans le cou et trois descabellos, ce qui ne gomme pas le sourire de la face de l’histrion.
Le troisième MIURA est court de charge et agité de tête à la cape, d’où un toreo brouillon de RAFAELILLO. De plus, le toro «tianque» comme on dit par chez nous. Il pousse bien dans la pique, très et trop longue. Le Miura se défend aux banderilles et la présidence change le tiers alors qu’il n’y a que trois palos (dispersés !) sur le toro, décision non réglementaire et laxiste face au laisser-aller des cuadrillas.
La faena débute moyennement : accrochage de muleta et confiance mesurée du torero. Tout change à gauche où la charge du toro s’avère franche et encastée. Ce qui permet de voir quatre très bonnes naturelles longues et rematées et un grand pecho. Ce sera le meilleur de la faena. Ensuite, la qualité baissera et on finira en brouillon, le toro s’avisant. Deux pinchazos, un tiers d’épée et un descabello. Le public salue la volonté du torero. Le Miura est également applaudi.
Le quatrième toro, long, haut, ensellé désarme d’entrée le FUNDI sur une véronique du coté droit. Le torero se reprend avec une très efficace mise en place du toro face au cheval. Le Miura part avec beaucoup d’allant, étant piqué trop longtemps, ce qui nous prive d’une deuxième rencontre qui eut été fort intéressante. Aux banderilles, que FUNDI laisse avec pertinence à sa cuadrilla, le toro ne part pas et se défend de la tête. Dans la muleta, la charge est fade et la tête haute à droite, courte et menaçante à gauche. Le torero sort de sa besace un peu de tremendisme pour réchauffer l’ambiance et comme il conclut bien d’une entière contraire et d’un descabello, ce sera un salut au tiers, de quoi revenir mardi avec un a priori favorable. Le toro est applaudi, ce qu’il méritait pour la pique, mais pas du tout pour le reste du combat.
Le cinquième Miura apparaît lourd et présente une excroissance suspecte sur le haut de patte arrière gauche. Personne ne l’a vu ou ne l’a jugé anormal du débarquement jusqu’au sortéo.. ? Toreo de cape bref, lointain, vulgaire et sans aucun temple de PADILLA. La routine, quoi. Quelques remates sur le burladero et voici l’extrémité de la corne droite en piteux état. La pique est fort poussée avec fixité, il sort en s’affalant dans le quite. Le Palco sonne le changement de tiers, ce qui provoque l’ire théatrale (mais chez Padilla, c’est du mauvais boulevard) du matador qui prend ostensiblement le Président à partie, puis de manière ridiculement outrancière, fait sortir à grands gestes son picador (qui restait prêt à piquer malgré le changement , pourquoi se gêner ?) Deux paires de banderilles partant en courant depuis le patio de caballos si on lui avait ouvert, sans temps d’arrêt à la réunion et plutôt sur la corne extérieure. Inévitable violin pour terminer.
Voyons, que retenir de la…comment appelle-t-on cela.. ? Ah oui, faena ! Le moment qui fit le plus d’effet fut, sans conteste, le geste très élégant du torero pour s’essuyer la main pleine du sang du toro, sur son costume de couleur claire. Il insista lourdement (tout est assez souligné chez lui) jusqu’à imprimer bien le dessin de sa main sur sa fesse gauche. Après…démonstration très pédagogique de toreo avec la muleta retrasada et toujours sur l’œil contraire. Mais reconnaissons qu’il excella dans le desplante, cherchant en permanence à enlever une imaginaire cocarde du frontal du toro. Le Miura n’était pas bon mais PADILLA réussit à être vraiment très en dessous. Peu importe, son sourire mi-niais, mi-insolent toujours plaqué sur sa figure, il termine avec un trois-quarts d’épée delantera. Avis partagés sur les gradins avec avantage aux lucides quand même.
Le sixième, sardo, est magnifique et d’entrée RAFAELILLO lui donne deux largas de rodillas au-dessus de la moyenne, profitant de la bonne charge engagée du toro. Cette fois, c’est l’extrémité de la corne gauche qui ne résiste pas aux coups contre les planches. Lors de la pique, le Miura pousse fort et désarçonne le piquero. Changement de tiers, ce toro étant peu piqué.
La faena va aller a mas d’abord dans trois séries à droite : le torero appelle de loin, muleta avancée, embarquant et conduisant bien la charge encastée du Miura. A gauche, c’est plus court avec des retours secs du toro. Repris à droite, on assistera à trois séries plus intenses, presque bagarreuses entre la volonté du torero de s’imposer et le genio du toro qui commence à poindre. Le succès est au bout de l’épée et RAFAELILLO qui le sait et le veut, enfonce un estoconazo fulminant. Mort rapide et de brave de ce très bon Miura. Deux oreilles qui ne choqueront que les comptables et sortie en triomphe pour ce torero qui le méritait par sa volonté.
Au bout du compte, une corrida inégale, parfois agaçante, jamais ennuyeuse grâce à la présence des toros de qualité variable mais jamais mièvres. Présidence pas facile de Didier GAUDIN.