Novillada Matinale : Deux-tiers d'aréne , temps nuageux et un peu frais puis agréable.
6 novillos de LA CAMPANA (Salamanque) pour
David MORA : Silence et Salut au tiers
Alberto AGUILAR : Salut au tiers aux deux.
Alejandro MORILLA : Salut au tiers et Silence
Un torero , un picador et des novillos .
J'ai refait hier ce que je ne fais que très rarement . Je me suis pressé de sortir dès le dernier novillo tombé pour pouvoir aller saluer David MORA d'un "Enhorabuena Torero !" , dont il me remercia fort modestement, afin de lui témoigner l' estime dans laquelle je tenais sa prestation . Je sais bien le caractére dérisoire de ce geste par rapport à la froideur et l'ingratitude dont fit preuve le public à son égard, mais je m'en serais voulu de ne pas l'avoir fait .
En effet , lors du premier novillo, véritable "Soeur de charité", il démontra la douceur et le bon goût de son toréo mais, de part le volume réduit et la bonté extrême de son adversaire, l'émotion, était absente .
Changement radical avec le quatrième novillo : Nectareo, un costaud très sérieusement armé et qui devint rapidement avisé . Violemment expédié à terre après la troisième véronique, le torero est repris au sol et miraculeusement , seule sa veste , déchirée sur toute sa hauteur , fait les frais du coup de corne . Que croyez vous qu'il fit ? Simplement quatre chicuelinas atrocement serrées au fil de la corne !
Vint la faena . Avec les coups d'oeil du novillo vers le torero avant de charger , comme autant de sourdes menaces . Et le torero d'aligner les séries à chaque fois au bord du précipice . Dans un derechazo, Nectareo répond au cite, s'élance et durant un quart de seconde, incline ses cornes en direction du torero. Durant cette éternité, MORA n'esquisse pas le début d'une amorce de mouvement de recul et Nectareo reprend sa trajectoire vers la muleta .
Pour une telle "aguante" impavide , on n'a pas besoin d'autre chose que de qualités hormonales hors normes diront les uns , de "cojones" affirmeront plus prosaïquement les autres . Quoi d'autre ? Oh rien , sinon une bonne estocade entière après une mise en place très difficile d'un novillo restant aux aguets jusqu'au bout . Une épée presque décisive mais Nectareo ne l'entendait pas ainsi , faisant partie des morts qu'il faut tuer . Feignant une agonie proche , il fit subir un calvaire au puntillero en le poursuivant aprés s'être relevé !
Et pour avoir vaincu un tel adversaire, dans une faena où l'art s'ajouta à la lidia et au courage dans des séries de classe, que retint le public ? Le désastre d'un puntillero !
"Quant le sage montre la lune, l'imbécile regarde le doigt ."
Le lot de LA CAMPANA fut un régal pour les yeux : cinq toros de robes dans les gammes de colorado et castaño avec des cercles plus sombres ou clairs autour des yeux et du mufle, des armures fines et larges . Seul le premier était d'un trapio plus modeste . Le sixième, noir et d'armures ouvertes vers l'extérieur, détonait .
Au moral, rien d'exceptionnel au cheval . Douze piques, mais de nombreuses deuxièmes rencontres symboliques. Souvent des comportements empreints de rouerie . Le meilleur exemple étant le cinquième qui contourna le cheval d'abord vers l'avant puis vers l'arrière, cherchant avec les cornes le haut de l'équipage .
Pour le reste, hormis le premier, véritable "carreton", tous les autres permettaient d'être toréés, à condition de le vouloir, car violence et sentido accompagnaient toujours leurs charges. Bref , un lot passionnant pour l'aficionado attentif .
J'ai exposé plus haut tout le bien que je pensais de David MORA . Ses deux compagnons de cartel souffrirent beaucoup de la comparaison .
Il existe des milliers de toreros du calibre d'Alberto AGUILAR , et beaucoup mériteraient plus de toréer, tant son toréo manque de personnalité, et trahit déjà une lassitude que l' on partage avec lui sur les tendidos .
Quant à MORILLA, on dirait qu'il veut mais qu'il ne peut . Il ne consentit jamais à se départir d'un toréo trés marginal , les pieds souvent mobiles . Ne pas s'accrocher devant des adversaires exigeants mais qui permettent le succés n'augure pas d'une réussite dans cette jungle qu'est la toreria ...
Terminons avec la superbe pique donnée au retors cinquiéme . Le jeune et léger picador exploita au mieux les qualités de mobilité de son cheval pour tenir acrobatiquement au bout de sa pique , sans jamais le lâcher, le novillo qui tournait pourtant de l'avant vers l'arrière de sa monture . Il le reçut avec assurance dans la deuxième charge pourtant violente, piquant juste et avec précison .
Que dût-t-il penser ensuite de se voir bien moins applaudi que ses pairs dont le seul mérite de lever la pique pour préserver le potentiel de leur novillo ?
Bronco